C’est un témoignage qui a fait parler ces derniers jours. Celui d’une automobiliste, Joanna, qui raconte comment sa voiture a soudainement freiné sur l’autoroute, causant un accident inévitable. « Elle s’est arrêtée, sans action de ma part et alors qu’il n’y avait aucun obstacle devant moi, décrit-elle à France Inter. C’est allé très vite, trois secondes pour arriver à l’arrêt. La voiture derrière est venue me percuter, et mon véhicule a fait un 180 degrés ».
Selon Joanna, elle aurait été victime de ce qu’elle décrit être un « freinage fantôme ». « Ma voiture est équipée d’aide à la conduite, y compris d’un système d’aide au freinage et ça m’était déjà arrivé que ça se déclenche, y compris à des moments pas forcément opportuns, mais à faible vitesse, et il y avait toujours une raison. Et il y avait un signal sonore ou visuel à ce moment-là. En avril, ça n’a pas du tout été le cas », raconte-t-elle.
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Alors que la gendarmerie réclamait une enquête après avoir auditionné les deux automobilistes concernés, la justice l’a refusée. Après avoir témoigné dans le journal lyonnais Le Progrès, Aurélie décide alors de lancer un appel à témoignage début juillet, recevant très rapidement près de 250 réponses partageant une expérience similaire. « À chaque fois, ce sont des véhicules récents, entre 2017 et 2025. Toutes les marques sont concernées même si Peugeot, Citroën et Skoda sont les plus citées », rapporte-t-elle.
Si bien que c’est le ministère des Transports lui-même qui a annoncé se saisir de cette affaire. « Un échange a eu lieu le 7 août dernier entre [cette automobiliste] et le service de surveillance du marché des véhicules et des moteurs (SSMVM), un service rattaché au ministère des Transports. [...] Le ministère va interroger les constructeurs et procéder à la réalisation d’essais », a déclaré le ministère à Ici, précisant que d’autres cas lui ont été remontés.
« Je suis absolument certaine de ne pas avoir freiné »
L’accident de Joanna aurait en effet pu bien plus mal se terminer, les passagers qui l’accompagnaient s’en sont sortis avec « de petites blessures », comme une entorse des cervicales ou des gros hématomes.
Mais le récit d’une automobiliste pour des faits datant de décembre 2023 s’avère bien plus dramatique. « On revenait de déplacement avec mon assistante. J’étais à vitesse normale sur l’autoroute. Et la voiture a freiné subitement, alors que j’étais en train d’accélérer. En quelques secondes, on est passé de 130 km/h, à l’arrêt. On a été percutées par l’arrière. Ma passagère est décédée, je suis tombée dans le coma », raconte Aurélie, toujours auprès de France Inter.
Alors que sa voiture a été expertisée trois fois, aucun dysfonctionnement n’a été détecté. « Je suis absolument certaine de ne pas avoir freiné. Il n’y a pas eu de bip sonore, de lumière. C’est comme si on avait enclenché un frein moteur puissant », décrit-elle.
Aurélie a été condamnée début juillet à de la prison avec sursis pour homicide involontaire. Mais celle-ci est persuadée de son innocence. « Mon objectif, c’est que justice soit rendue, que la vérité soit faite. Que quand il y a un défaut sur une voiture, ce soit reconnu, pour la victime, pour les familles. Ça ne ramènera pas ceux qui sont partis, mais ça pourra changer le futur, parce qu’on aura renforcé les contrôles, parce qu’on sera plus vigilant », poursuit-elle.
Le freinage d’urgence remis en cause ?
Ces phénomènes de « freinage fantôme » pourraient-ils être dus à des dysfonctionnements des systèmes de freinage d’urgence automatiques, obligatoires sur tous les véhicules neufs vendus dans l’Union européenne depuis 2022. Pas impossible pour Christophe Theuil, vice-président de la Fédération française de l’expertise automobile. « Les conditions environnementales peuvent être défavorables à ces systèmes de capteurs, en cas de pluie, brouillard, neige, obscurité, soleil rasant ou contre-jour. Dans ces cas-là, le système peut se déconnecter, mais parfois, il ne le fait pas et les capteurs peuvent détecter des choses qui n’existent pas », avance-t-il auprès d’Ici.
Ce dernier met néanmoins en garde contre des erreurs humaines ou d’autres problèmes sur le véhicule venant dérégler les capteurs, et souligne l’utilité d’un « outil qui sauve des vies tous les jours ».
De leur côté, les constructeurs affirment n’avoir détecté aucune anomalie du système de freinage d’urgence durant les analyses des véhicules accidentés. Charge au ministère des Transports désormais d’étudier si oui ou non, il s’agit bel et bien d’un phénomène répandu.
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