L'annonce est symbolique mais révélatrice du drame humain en cours à Gaza. Le 22 août, l'ONU a officiellement déclaré l'état de famine à Gaza, après des mois de mise en garde. Le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), un organisme des Nations unies dont le siège est à Rome, a donc confirmé qu’une famine est en cours dans le gouvernorat de Gaza et qu’elle devrait s’étendre à ceux de Deir Al-Balah et de Khan Younès d’ici à la fin du mois de septembre.
Ces derniers mois, les signaux alarmants se sont multipliés, notamment l'alarmant témoignage du responsable local de Médecin Sans Frontières. "C’est une famine que nous aurions pu éviter si on nous l’avait permis. Pourtant, la nourriture s’accumule aux frontières en raison de l’obstruction systématique d’Israël", a déclaré Tom Fletcher, responsable de la Coordination des affaires humanitaires des Nations unies, alors que le blocus d'Israël se poursuit.
Plus de 500 000 personnes touchées, 641 000 d'ici fin septembre
Selon les derniers chiffres de l'ONU, plus d’un demi-million de personnes à Gaza vivent dans des conditions de détresse alimentaire "catastrophiques", niveau le plus élevé de l’IPC. Un nombre, obtenu sur la base d’informations recueillies jusqu’au 15 août, qui devrait monter à presque 641 000 d’ici à la fin de septembre.
Pour qualifier une situation de famine, des critères très précis doivent être réunis. Depuis 2004, il existe une échelle de classification intégrée des phases de sécurité alimentaire (IPC), qui permet de définir précisément une situation dans un territoire, selon des critères précis. Toutefois, tous les pays ne participent pas à la remontée des critères.
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Parmi les critères, on retrouve la part de foyers confrontés à un manque extrême de nourriture ; le pourcentage d'enfants souffrant de malnutrition aiguë ; et le nombre d'habitants sur 10 000 ou d'enfants de moins de cinq ans sur 10 000 à mourir chaque jour d’inanition pure et simple ou en raison d’une interaction de la malnutrition et de la maladie.
La famine est le cinquième et dernier stade de cette échelle, caractérisé par une "privation extrême de nourriture". Pour atteindre ce stade, il faut que 20 % des ménages d’une région soient confrontés à une extrême pénurie de nourriture, que 30 % des enfants souffrent de malnutrition aiguë et que deux adultes sur 10 000 meurent quotidiennement "en raison directement de la faim ou de l’interaction de la malnutrition et de la maladie".
90 000 femmes et enfants ont besoin d’un traitement nutritionnel d’urgence à Gaza
En février dernier, Carl Skau, directeur exécutif-adjoint du PAM, avait déclaré au Conseil de sécurité des Nations unies qu’une famine était imminente dans le nord de la bande de Gaza si rien ne changeait. Six mois plus tard, ces craintes sont dont confirmées.
De son côté, l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) affirmait en juillet recevoir chaque jour des "messages désespérés de famine" provenant de civils, mais aussi du personnel de l'agence. "Les autorités israéliennes affament les civils, dont un million d’enfants, n'hésite pas à affirmer Philippe Lazzarini, commissaire général de l'UNRWA. Certains restent des jours sans manger. Les familles ne trouvent pas de farine."
En 2022, sept pays touchés par la famine
Une situation de famine qui touche également 35 000 personnes au Sud Soudan. En 2022, la famine a touché sept pays en situation de conflit prolongé ou d’insécurité : la Somalie, l’Afghanistan, Haïti, le Burkina Faso, le Soudan du Sud, le Nigéria et le Yémen.
Le stade en dessous de la famine, le stade 4, est celui de l'urgence alimentaire, qui concernait jusqu'à présent Gaza : 39% des habitants étaient dans cette situation en juillet, soit 876 000 personnes. Une situation qui touche 2,4 millions de personnes en Afghanistan, 1,67 million de personnes au Sud Soudan, 1,4 million en Haïti ou encore 350 690 en République centrafricaine.
Un indice de la faim dans le monde
Le stade 3 touche de nombreux pays d'Afrique et d'Asie dont 10 millions de personnes en Afghanistan ou encore 566 000 personnes en Namibie, soit un cinquième de la population. La phase 2 désigne une phase de stress alimentaire, et la phase 1 une situation "minimale".
Au niveau international, il existe un indice de la faim dans le monde, basé sur quatre critères : la part de la population qui est sous-alimentée, la proportion d’enfants de moins de cinq ans souffrant d’un retard de croissance, la proportion d’enfants de moins de cinq ans souffrant d’émaciation et le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans.
Aucun pays n'est dans la situation qualifiée d'extrêmement alarmante, neuf pays sont dans une situation qualifiée d'alarmante : le Yémen, la Somalie, Madagascar, le Burundi, le Soudan du Sud, la République démocratique du Congo, le Lesotho, le Niger et la République centrafricaine.
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