Les victimes présumées dénonce une violente agression qui leur a laissé des séquelles aussi bien physiques que psychologiques. À la suite d'une altercation survenue dans la nuit du 15 au 16 août dans le village de Royère-de-Vassivière (Creuse), plusieurs plaintes ont été déposées pour "violence en réunion à caractère raciste".
D'après L'Humanité, qui reprend des informations d'ICI Creuse, et La Montagne, les faits se sont produits dans le cadre de la fête du 15 août organisée par cette commune de 572 habitants. Plus précisément, le quotidien régional rapporte que l'incident s'est déroulé après la fête et a impliqué des personnes y ayant participé.
Violente agression et "chasse au nègre"
Selon les différentes sources, un groupe de jeunes aurait été agressé par plusieurs personnes. "Le soir de la fête du 15 août, une attaque raciste a eu lieu à Royère-de-Vassivière, relate un tract distribué quelques jours plus tard sur le marché du village et relayé par La Montagne. Des habitants du village se sont fait agresser par des personnes faisant partie de l’organisation de la fête. Ces derniers ont tenu des propos racistes et ont tabassé les membres du groupe."
"Les personnes agressées sont parties en courant, les agresseurs les ont pourchassées dans le village à pied puis dans plusieurs véhicules sans répit en appelant à une 'chasse au nègre', poursuit le texte imprimé sur le tract. Les personnes qui ont vécu ces agressions se sont réfugiées où elles pouvaient. Elles portent sur elles des séquelles physiques et psychologiques."
Vive émotion au sein du village
La diffusion de ce tract a provoqué un certain émoi au sein de la commune et déclenché de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux, certaines personnes dénonçant rapidement une "ratonnade" menée par des individus ayant tenu des propos ouvertement racistes.
"Une dizaine de 'courageuses' personnes (dont deux du comité des fêtes) s’en sont pris à une jeune personne racisée et ses amis installés à une table de la buvette, en fin de soirée. Sur fond de 'Sale Noir, on va te buter' !", a par exemple témoigné un internaute, cité par La Montagne.
Les organisateurs de la fête reconnaissent une bagarre, mais nient le caractère raciste
Directement mis en cause par le tract diffusé sur le marché de Royère-de-Vassivière, le comité d'organisation n'a pas tardé à réagir par la voix de l'un de ses membres, Cédric Lecomte. Également conseiller municipal de la commune, ce dernier a réfuté le caractère raciste de l'altercation et assuré qu'il allait "porter plainte contre ces accusations"
"À la fin de la fête vendredi soir, alors qu’on était en train de partir, on a vu un groupe d’une dizaine de jeunes qui squattaient, qui traînaient sur une table, et qui essayaient de piquer des gobelets, raconte Cédric Lecomte, cité par La Montagne. Ils ont commencé à nous jeter des bouteilles, et on ne s’est pas laissé faire. Ils sont partis en courant après. Mais oui, ça s’est engueulé, c’est sûr. Oui, il y avait un monsieur noir, mais ça aurait pu être lui comme moi, ça n’a rien à voir avec le racisme."
La gendarmerie évoque une "altercation entre personnes alcoolisées"
Intervenue au moment des faits après avoir été contactés par le groupe de jeunes, la gendarmerie a de son côté confirmé que des "propos discriminatoires" avaient été tenus, mais a aussi démenti qu'une "chasse à l’homme" s'était déroulée dans la commune.
Selon la version retenue par les forces de l'ordre, il se serait simplement agi d'une "altercation entre personnes alcoolisées dans les deux parties". Les victimes présumées n'ont toutefois pas souhaité en rester là et ont contacté une avocate pour porter l'affaire en justice.
Les victimes prennent une avocate
Six jours après les faits, le 21 août dernier, Me Corinne Bouillon a ainsi annoncé que plusieurs plaintes allaient être déposées "pour violences en réunion avec ITT ou pas selon les personnes, à caractère raciste ou pas, selon les personnes, et en présence d'un enfant mineur. L'objectif de ce dépôt de plainte, c'est de faire en sorte de retrouver les agresseurs, mais aussi d'autres victimes."
"Nous poursuivrons en diffamation toutes les personnes qui contrediront le caractère raciste des faits, ajoutait la représentante des jeunes agressés, citée par La Montagne. Les victimes sont toujours sous le choc. Elles ont peur des représailles, et c'est aussi ma plus grande crainte."
Cinq plaintes déjà déposées, deux à venir
À l'occasion d'un rassemblement de soutien organisé ce lundi 25 août à Royère-de-Vassivière, l'avocate a confirmé que cinq plaintes avaient d'ores et déjà été déposées et que "deux supplémentaires seront déposées d'ici à mercredi" par les victimes présumées qu'elle représente.
Me Corinne Bouillon a par ailleurs affirmé à La Montagne que ses clients se seraient vus prescrire entre "six et quinze jours d'ITT" à la suite de visites chez un médecin qui aurait constaté les séquelles physiques et psychologiques laissées par l'agression subie dans la nuit du 15 août.
Un village coupé en deux ?
Comme le rapporte le quotidien régional, ce rassemblement a par ailleurs mis en lumière l'état de tension dans lequel se trouve actuellement le village, apparemment fracturée entre ceux qui dénoncent les faits "intolérables" survenus après la fête du 15 août et ceux qui les minimisent.
Selon La Montagne, le rassemblement de soutien a ainsi réuni environ 300 personnes, pour dénoncer une agression qui "s'inscrit dans la montée des idées haineuses et racistes et leur banalisation", selon le comité de soutien aux victimes, organisateur de l'événement.
"C'est extrêmement grave"
Parmi les personnes ayant participé à ce rassemblement, certains n'étaient pas sur place au moment des faits, mais ont reçu "des témoignages directs" des violences commises cette nuit-là et se disent "scandalisés par ce racisme et cette non-tolérance de l'autre".
"Des bagarres sur fond d'alcool, il y en a toujours eu dans les fêtes de village, resitue un couple de sexagénaires interrogé par La Montagne. Mais que des gens puissent être traqués avec des pick-up... C'est extrêmement grave."
Le caractère raciste de l'agression toujours réfuté par certains habitants
À l'inverse, d'autres habitants auraient, selon le quotidien local, pris leur distance et affiché leur "dédain" vis-à-vis de ce rassemblement, affirmant notamment que "la tournure que prennent les événements est téléguidée par certains partis politiques".
"On sait qu’il y a eu une bagarre le 15 août, mais il se trouve qu’il y avait une personne noire dans cette bagarre et c’est parti sur le racisme, affirme un membre de l'équipe municipale cité par La Montagne. Il n’y a pas beaucoup d’habitants de Royère ce soir, mais tout le Plateau (de Millevaches) est descendu."
Salut nazi et menaces de mort...
D'après plusieurs sources relayées par La Montagne, le rassemblement de soutien aurait par ailleurs été émaillé d'incidents particulièrement inquiétants. "Pendant le discours de l'avocate, j'étais face à un groupe de personnes très bruyantes et j'ai aperçu un homme faire un salut nazi plusieurs fois, une bonne dizaine de fois. Ensuite, un autre a dit en passant vers moi : 'la prochaine fois on viendra avec les fusils et les cartouches'", témoigne ainsi une participante.
Selon le quotidien régional, d'autres menaces auraient été "prononcées", visant directement Me Corinne Bouillon. Une personne aurait notamment déclaré : "Celle-là, je vais me la faire". La Montagne précise que l'avocate a annoncé qu'elle allait elle-même porter plainte contre X pour ces propos, et que "trois personnes pourraient être entendues comme témoins par les gendarmes, dont deux pour le salut nazi".
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