
POLITIQUE - L’erreur a de quoi plaire aux indépendantistes corses mais politiquement parlant, c’est mal venu. Ce mercredi 30 juillet, le ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation François Rebsamen a malencontreusement évoqué le « pays corse » en pleine présentation du projet de loi sur le statut de l’île et alors même que la controverse enfle sur le choix des termes retenus.
Le texte voté à l’unanimité moins une voix par l’Assemblée de Corse et soutenu par le gouvernement intègre entre autres dispositions clés la notion de « communauté » corse. Laquelle fait débat, certains constitutionnalistes, à l’image de Benjamin Morel, estiment que celle-ci est « contraire aux principes fondamentaux de la République ». Le Conseil d’État, saisi pour avis, a recommandé sa suppression sans que le gouvernement n’en tienne compte.
« La consécration de cette autonomie ne heurte aucun des grands principes qui fondent la République », a assuré François Rebsamen à l’issue du Conseil des ministres. En face, l’Assemblée corse avait fait connaître son opposition ferme à tout changement. Dans ces conditions, et malgré le soutien du gouvernement, le passage devant le Parlement national, qui doit voter le texte exactement dans les mêmes termes avant d’être réuni en Congrès s’annonce délicat.
« Je rappelle que la Corse est le pays… »
Interrogé sur la possibilité d’un plan B au cas où le texte se ferait retoquer par l’une ou l’autre des chambres, François Rebsamen a expliqué s’en remettre à « la démocratie ». Dans le texte voté par les élus corses « figure le mot “communauté”. Tout le monde a bien compris que la communauté, ce n’est pas le “peuple corse” », a-t-il fait valoir, alors que cette dernière expression avait été rejetée par les précédents représentants de l’État en charge du dossier. Et le ministre de poursuivre : « C’est le chemin vers une vie démocratique apaisée pour la Corse dont on a besoin. Car je rappelle que la Corse est le pays, pardon la région, excusez-moi… » François Rebsamen a ensuite tenté de déminer, en évoquant les « contrats de pays » qui existaient jusque dans les années 2010.
Mais ce petit lapsus risque de faire tiquer les détracteurs du projet de loi, en particulier son collègue de l’Intérieur Bruno Retailleau. En tant que chef de la droite sénatoriale, l’élu de Vendée avait estimé en mars 2024 que la consécration de la « communauté corse » équivalait à « la reconnaissance d’un communautarisme » par la loi. « Reconnaître une communauté historique, linguistique et culturelle revient bien à reconnaître la notion de peuple corse » et « pour nous, ce sera non », affirmait-il.
Devenu ministre, sa position n’a guère changé. « Je voudrais dans un souci de transparence, mais également de cohérence avec ce que je crois - et que j’ai toujours cru - vous faire part de mon désaccord quant à ce texte sur la Corse, dans sa version originelle », a déclaré le président du parti Les Républicains (LR), qui « regrette » que n’aient pas été retenues « les modifications suggérées par le Conseil d’État », selon lui « salutaires ». « Je crains que ce projet de loi ne suscite, en définitive, que des frustrations » a-t-il ajouté lors d’une déclaration en conseil des ministres et dont l’AFP a eu copie. Bien loin de l’optimisme de François Rebsamen qui vante un « texte de compromis » qui « peut aboutir ».
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